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Étudiantes et travailleuses du sexe : « Si je dois subir l’exploitation dans un emploi précaire, autant gagner davantage »

Environ 2, 3, voire peut-être 4 %. Les étudiants qui se lancent dans le travail sexuel demeurent difficiles à quantifier, mais ils constituent une réalité. Bien que tous ne choisissent pas cette voie par pur plaisir, nombreux reconnaissent que ces revenus ont constitué une aide essentielle en cas de difficultés financières. Afin de prévenir ces situations, certains plaident en faveur d’une indépendance accrue entre les bourses du Crous et les revenus parentaux.

« Dès le départ, j’ai débuté pour acquérir une plus grande indépendance financière, pour pouvoir me concentrer sur mes études et améliorer ma qualité de vie. » Déborah (le prénom a été modifié) a obtenu deux diplômes de master et poursuit actuellement un doctorat. Cela fait maintenant dix ans qu’elle exerce comme « étudiante-travailleuse du sexe ». Une alternative aux emplois étudiants traditionnels, qu’elle a également expérimentés : « J’ai été serveuse dans un restaurant au début, mais c’était loin de mon université, et je me sentais constamment épuisée. J’aurais pu continuer, mais j’ai entendu parler de l’escorting… », confie la jeune femme.

Emilie est également escort girl. Cependant, elle n’a pas réussi à obtenir son diplôme. Après avoir décroché une première fois au lycée, elle a pourtant réussi à reprendre ses études et a atteint la deuxième année de licence en biologie. Mais une fois de plus, elle s’est retrouvée dépassée. Comme début d’activité, elle a également essayé un emploi étudiant classique en tant que vendeuse dans un magasin le samedi. Huit heures de travail en plus des cinq jours de cours à l’université, qui s’étalaient de 9 heures à 17 heures. Bien qu’elle gagnait 300 euros par mois, elle a peu à peu perdu son énergie. « Beaucoup d’étudiants peuvent jongler avec tout cela en ayant beaucoup d’énergie, mais moi j’étais épuisée. » C’est à l’âge de 25 ans qu’Emilie a effectué sa première prestation. « Je voulais absolument poursuivre mes études… » Finalement, l’écart était trop grand. Des problèmes psychologiques se sont enracinés avec le temps, et malgré les difficultés, l’université a refusé d’adapter son emploi du temps. C’est ainsi qu’un deuxième échec s’est ajouté au premier.

Près de 8 % des étudiants d’une université considèrent l’éventualité

Combien d’étudiants, à l’instar de Déborah et Emilie, font appel à la prostitution pour subvenir à leurs besoins pendant leurs études ? « Les chiffres largement avancés dans la presse française il y a environ une décennie, évoquant 40 000 étudiants impliqués dans la prostitution, ne sont étayés par aucune étude vérifiable », souligne immédiatement Thierry Schaffauser, coordinateur national du Strass, le syndicat du travail du sexe. Bien que le phénomène soit difficile à évaluer à l’échelle nationale, quelques sondages ont été réalisés dans certaines universités. Lors de l’année académique 2011-2012, à Bordeaux III et à Poitiers, entre 2 % et 3 % des étudiants interrogés ont indiqué avoir été « confrontés à une situation de prostitution étudiante ». Ce chiffre monte à 4 % à l’université Paul-Valéry de Montpellier, selon une enquête menée la même année.

En 2013, des enquêtes anonymes menées au sein des universités Evry-Val-de-Seine et Paris-Sud-XI (Orsay) ont mis en lumière des résultats intéressants. Parmi les 843 jeunes hommes et femmes ayant participé aux questionnaires, 2,7 % ont admis avoir eu des relations sexuelles en échange d’argent ou de biens, tandis que près de 8 % ont exprimé leur intention de le faire à l’avenir. « La réalité de la prostitution étudiante est indéniable. Il est envisageable que cela puisse représenter une proportion non négligeable en termes absolus », avait commenté la députée Danielle Bousquet, qui présidait alors la mission parlementaire portant sur ce sujet.

« Mon choix de travail favori jusqu’à présent »

Une proportion de chiffres qui suscite l’attention, voire provoque la surprise. Et ces données ne prennent pas en compte ceux et celles qui optent pour Internet plutôt que des interactions physiques. Sarah (le prénom a été modifié) est l’une de ces cam girls dont le nombre a connu une croissance exponentielle ces dernières années grâce à l’émergence de plateformes spécialisées. Elle réalise des « lives » plusieurs fois par mois pour satisfaire sa clientèle à l’autre bout de l’écran.

Cette étudiante en cinéma génère un revenu mensuel allant de 300 à 1 100 euros en tant que travailleuse du sexe. Certains mois sont plus compliqués, en raison du manque de temps qu’elle privilégie pour ses études. « Les sessions en direct peuvent durer jusqu’à trois heures, et cela peut être mentalement épuisant. Les clients ont souvent beaucoup de demandes sans finir par acheter quoi que ce soit. Malgré tout, parmi tous les petits emplois que j’ai eus, c’est celui que j’ai préféré », explique cette cam girl. « Parfois, je prends même du plaisir. Pour être honnête, je ne pourrais pas continuer si ce n’était pas le cas. »

Déborah, qui travaille comme prostituée dans le monde physique, admet qu’elle peut parfois ressentir du plaisir, mais elle insiste sur le fait que c’est malgré tout un travail subi. « Certes, ce travail m’a permis de ne plus être aussi épuisée. J’ai enfin pu payer mon loyer dans un quartier calme, mais il est important de rappeler que ce n’est pas un travail comme les autres : il comporte des risques psychologiques absents dans d’autres domaines », témoigne-t-elle. Elle souligne également que l’exploitation du corps est présente partout, que ce soit chez les ouvriers ou les femmes de ménage. « Une option moins défavorable », ajoute Emilie, qui mentionne avoir la chance de pouvoir fixer ses tarifs à 200 euros de l’heure. « Si je dois être exploitée, que ce soit en faisant du travail au noir ou autre chose, autant gagner davantage. Ou autant gagner plus en travaillant moins d’heures. »

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